Les deux derniers poèmes de Philippe Guiguet Bologne.

Deux nouvelles parutions poétiques du tangérois Philippe Guiguet Bologne : « L’éciel », aux Éditions L’Harmattan et « Petit poto ballon peau rouge », aux éditions Scribest.

Deux poèmes qui tissent avec une immense sensibilité l’âme humaine, Tanger, le Détroit, la migration, la mystification de l’Europe, la souffrance et le désespoir mais aussi l’intensité et la force invincible de la vie qui coule dans les veines du poète et de l’éros de ses héros… 

Découvrez ces  deux ouvrages ainsi que des extraits.

guiguet-bologne-754tanger-experience - le web magazine de Tanger - Poème Petit poto ballon peau rouge de Guiguet Bologne

tanger-experience - le web magazine de Tanger - Poème l'éciel de Guiguet Bologne« L’éciel ».
À l’heure où le futur se referme sur lui-même, le poète a décidé de s’ouvrir sur toute la beauté du monde. Il accompagne Djihad, le jeune homme né sur les falaises de Tanger, dans ses errances sans but et sans avenir, avant de se perdre la nuit dans une médina où ont été libérées toutes les chimères ; il fait d’un poème de Mahmoud Darwish sa terre amoureuse avant de s’engouffrer dans les profondeurs de ce Sud de déserts et d’oasis, qui font l’homme plus homme, jusqu’à trouver enfin un territoire sur lequel construire sa demeure : la mémoire et l’amour. Il devient juif et Arabe pour demeurer au plus près de l’humanité et toujours rester au cœur des marges du monde ; il foule les sentiers de la forêt qui domine le Détroit, là même où se cache une foule d’errants clandestins qui achèveront leur voyage en pavois de bancs de coraux. Le poète n’a plus qu’à se fondre dans son propre texte, jusqu’à ne devenir qu’une parole, une langue, un mythe rapporté parmi les légendes, s’en allant creuser sa propre tombe au faîte de la falaise de Djihad, après un épique et vain corps-à-corps avec un ange désirable, et avoir sillonné, encore et toujours, les rivages au bord du Détroit, à la recherche d’un sens inutile et providentiel à tout ça…

Extrait…
La lumière est liquide et perméable aux heures d’après l’orage quand la terre respire un parfum de rouille et d’herbe coupée dans le ciel incertain le temps disparaît tandis qu’un soleil blanc tourne au faîte des vieux immeubles aux songes écaillés la ville attend sur les bords de son reflet je me souviens des restes d’une mélodie de raï chantée par des hétaïres fières girondes et lumineuses comme des déesses auxquelles fut donné le repos de s’incarner leur galbe profond et la gorge lourde résonnant de voix tailladées au couteau où riait toute l’impertinence de la nuit le monde est si petit pour qui sait regarder où les choses commencent et où cesse le vertige à peine un tour de piste et disparaître dans l’aube safre et glacée des matins encore ensommeillés…

Se procurer L’éciel:
Éditions L’Harmattan, « Poètes des cinq continents », 2025 – 92 pages, 13 Euros, 130 dh
Disponible dans toutes les librairies sur commande, sur le site de l’éditeur https://www.editions-harmattan.fr/cat…/livre/l-eciel/79783, sur les plateformes de vente des livres telles que www.fnac.com, www.librest.com, www.lalibrairie.com, au Maroc sur www.livremoi.ma, à Tanger à et à la , au Bourg d’Oisans à …

 

tanger-experience - le web magazine de Tanger - Poème Petit poto ballon peau rouge de Guiguet Bologne« Petit poto ballon peau rouge »

Petit poto ballon peau rouge est subsaharien.  Il parle le bambara, un français parfait et l’arabe dialectal marocain. Il maîtrise aussi quelques mots d’anglais. Migrant clandestin, il est resté piégé dans le goulot de Tanger, au bord du détroit de Gibraltar, face au littoral de cette Espagne qui, chaque jour par temps clair, l’interpelle douloureusement. Poussé par les siens, il a traversé des forêts, des montagnes et des déserts pour parvenir jusqu’à ces rivages ; il a mis sa vie au péril des forfaitures d’autorités corrompues et de trafiquants d’âmes peu enclins au respect de la dignité humaine. Il a défié les éléments et le voilà prisonnier d’un port qui lui interdit l’accès à son Eldorado, pourtant si proche, à portée du regard, mais aussi d’une noyade qui chaque jour ravit au monde tant de ses semblables. Petit poto ballon peau rouge est au désespoir, et cependant… de modestes boulots en amitiés précaires au Petit Socco, de rencontres bienveillantes en désagréments qu’il aura su surmonter, de lila chez ses voisins musiciens en longues promenades à l’heure du paseo, il est parvenu à se faire une place et une vie dans la ville. Une Tangéroise amoureuse le tient comme on garde un trésor, et il ne répugne pas à passer du temps avec un ancien officier de police qui, contre sa réelle tendresse, lui offre une tout aussi réelle protection. Il aime encore quelques touristes, de passage forcément, et pour promouvoir ses charmes qu’il sait opulents, il s’est créé et gère avec application une page sur un site internet dans laquelle, sans qu’on puisse jamais le reconnaître, il raconte ses récits d’errant et de nomade céleste, et où surtout il met avec une franche impudeur son corps en scène : parce que ça l’amuse et que ça le rassure sur lui-même, et « qu’un jour ça rapportera peut-être beaucoup d’argent ! » Il se rêvait français ou allemand ou canadien, et le voilà maintenant s’imaginant en star de la toile érotique à Tanger. Le pseudonyme qu’il s’est choisi, petit poto ballon peau rouge, fait résonner en lui toute son enfance heureuse et tout ce qu’il est, assure-t-il dans un sourire où l’on saisit combien tout le mal du monde peut en contenir tout le bien, et vice-versa bien entendu. S’il est érigé en victime et en un symbole des drames de la survivance, rares sont cependant ceux parmi les plus nantis qui savent traverser la vie avec sa légèreté, sa nonchalance et sa délicatesse, ses sens du plaisir, de l’hédonisme et peut-être aussi de la plénitude et de l’intégrité. Il hantait les labyrinthes de la médina ; il s’est raconté pendant que nous nous amusions à nous aimer…

Extrait…
Je le vis alors entrer dans cette kasbah où à fleur de ciel j’avais exilé ma quiétude et faire fi de tous les remparts que j’avais pris une vie entière à élever entre mon repos et la fluidité du monde réfugié dans un marabout oublié de tous où ne vivait qu’une poignée d’esprits il y creusa un abri où trouver la paix de quelle tendre grâce il faisait montre en m’accueillant dans cet antre où planaient les effluves des dikhr passés et des sueurs de stupre épicées (…) petit griot irradiait dans les rues blanches du noir de sa peau offerte au septentrion giclée d’onyx lancée dans le ciel du détroit aux longs des pentes coulant jusqu’au port là où dorment les eaux glabres de l’attente le monde s’affichant d’une telle onctuosité ma kasbah en glissait jusqu’à ses rivages vagues et en galbes où errait notre ami dans une humeur de soir sans couchant au bord des larmes et de se laisser chavirer avec ses compagnons d’errance et de misère à l’ombre du mausolée contrefait en radeau ils vaguaient perdus dans un rare égarement aussi bien parés au naufrage qu’au sabordement la blanche kasbah lui montra ses ombres et lui apprit ce qu’elle savait de ruines…

Se procurer Petit poto ballon peau rouge.
Scribest, 2025 – 72 pages, Illustrations de Mohamed Lekleti – 12,50 euros, 120 dh
Disponible dans toutes les librairies sur commande, sur le site de l’éditeur www.scribest.fr, sur les plateformes de vente des livres www.fnac.com, www.librest.com, www.decitre.fr, au Maroc sur www.livremoi.ma, à Tanger à Gallery Kent et à la Librairie les Insolites, au Bourg d’Oisans à Buvard – Librairie et café…

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