Mon Covid 19… Récits Caribéens par Anne Lévy.

Fille du Détroit, Anne Lévy est née à Gibraltar et a grandi au Maroc. Elle est aujourd’hui architecte installée à Marseille et ayant travaillé aussi à Tanger. Elle nous livre une expérience très singulière et douloureuse vécue lors du confinement. En voyage aux Caraïbes, début avril, elle est tombée malade du Covid 19. Après avoir surmonté cette difficile épreuve et suite à un post du journaliste Paul Molga ayant vécu une expérience similaire Anne a décidé de nous parler de son propre cas. Elle nous raconte son expérience…

Anne Lévy nous précise les raisons de cette publication:

Le post du journaliste Paul Molga et la gestion fulgurante de sa contamination, dont je me réjouis pour lui, relancent une interrogation qui me taraude depuis que j’ai survécu à un COVID sévère qui m’a conduite au CHU de Fort de France, où j’ai lutté pendant 3 semaines contre la maladie. Il m’a fallu 2 semaines de plus avant que mes poumons soient en capacité de supporter le vol retour. C’était aujourd’hui il y a 7 mois, le 23 mars, hospitalisation en urgence à J6.
Les médecins du CHU suivaient les directives gouvernementales: Doliprane, oxygène et anticoagulants…. puis, antibiotiques au vu de la dégradation exponentielle des poumons.
Aurais-je passé 3 semaines dans cette lutte si j’avais été à Marseille et prise en charge à l’IHU du Pr Raoult?

Cette question est sans doute vouée à rester sans réponse… mais comment ne pas se la poser?

Pour autant, je reste infiniment reconnaissante aux équipes médicales Martiniquaises qui ont pris soin de moi, jour après jour, nuit après nuit, sans relâche, au moment le plus aigu de l’épidémie.
Aujourd’hui le suivi médical post COVID sévère de l’hôpital Nord, me confirme le rétablissement de tous mes organes, confirme aussi que la chute de cheveux qui a failli me laisser la boule à zéro deux mois plus tard, sans prévenir, est un effet normal post traumatisme infectieux violent… (il semble heureusement, qu’il n’y ait pas de risque pour les dents !!) confirme enfin, une immunité extrêmement élevée… sans doute proportionnelle à la violence de la charge virale encaissée…
mais aucune explication ni solution face à une fatigue tenace et extrême… qui va et vient… qui m’accompagne…
Mon choix, après avoir tenté toutes sortes de traitements en naturopathie, sel, algues, argile, et autres herbacées, l’ignorer et vivre quand je peux, à 150% et 150 à l’heure…. un peu comme le rythme de battements que parfois, choisit mon cœur…
Au-delà de ce questionnement, dans la foulée de ce qu’a vécu Paul Molga et dont il a témoigné au jour le jour, je me décide aujourd’hui à partager ma propre expérience de la maladie.

Je le fais à travers un texte que j’adressais en deux temps, depuis la Martinique, à mon groupe de lecture qui réclamait de mes nouvelles. De retour à Marseille, je l’ai adressé à des êtres qui me sont chers, comme un besoin de faire savoir, de sortir de l’isolement terrifiant que porte en elle cette maladie, en tout cas au moment et dans les conditions où je l’ai vécue. C’était le début de l’épidémie, on comptait les morts tous les jours comme une litanie, et j’étais loin, si loin…
C’est si difficile de communiquer des moments aussi singuliers et intenses… l’écriture peut le faire parfois… ou tenter.  Beaucoup d’entre eux m’ont suggéré de le rendre public, m’y ont encouragée… raconter à ceux qui n’auraient jamais croisé un malade COVID sévère. Je le fais aujourd’hui, alors que 7 mois se sont écoulés et que la maladie, même si elle semble mieux maîtrisée, est là, encore.
Ça s’est passé pendant votre confinement, aujourd’hui vous n’êtes plus confinés, juste masqués et sous couvre feu pour certains…

 MON COVID 19… RÉCITS CARIBÉENS – 6 avril 2020

tanger-experience - le web magazine de Tanger - Le Covid de Anne Levy
Anne Lévy à sa sortie de l’hôpital de Fort de France

« Chères toutes,
Je n’ai pas eu la force de répondre à chacun de vos messages souvent tendres, drôles ou les deux, mais je vous en suis profondément reconnaissante.
Certaines d’entre vous m’ont demandé un résumé que je vous livre, je vous passe en effet quelques épisodes intermédiaires parfois cocasses et ou impressionnants…
En arrivant en Martinique le 15 mars où je retrouvais des amis avec joie pour 8 jours de voile, j’ai été violemment jetée dans la maladie ou prise par le virus, sans savoir où j’avais bien pu le croiser, sans doute ici ou en voyage, car aucune trace sur aucun de mes proches en métropole y compris après 15 jours.
Après 6 jours de fièvres de plus en plus intenses à bord, sans autre symptôme, j’ai été hospitalisée en urgence à l’hôpital de Fort de France, à l’isolement total après confirmation du Covid positif par test et scanner des poumons.
Depuis, de grosses fièvres en complications pulmonaires, il a fait de moi une brindille, exsangue, à bout de force, un être diminué, objet de tous les soins et toutes les attentions d’une équipe médicale sur attentive aux réactions intempestives et souvent inattendues de mon corps en prise avec le Covid.
J’ose penser que je remonte la pente car les médecins m’ont accordé un répit ce week-end avant prise de décision sur nouveau protocole compte tenu de l’état des poumons. Je respire avec de l’oxygène, en attendant de sevrer petit à petit mon corps de cet accompagnement.
Je suis noyée de tendresse à distance, mes filles, ma sœur, mon frère, ma famille, d’innombrables amis… les énergéticiens des uns et magnétiseurs des autres dont les énergies se bousculent sur le toit de l’hôpital de Fort de France à l’affût d’un accès vers mes sources et ressources… celles dont j’ai tant besoin.

Et puis les équipes soignantes qui me soignent, me piquent, me testent, me contrôlent, me nourrissent, m’habillent en doudou martiniquaise! … (suis arrivée sans rien il y a 2 semaines maintenant )
Les malades du Covid ici, guérissent et sortent… pour moi c’est plus long… il semble que la charge virale soit particulièrement lourde… les médecins découvrent avec moi… mais j’y arriverai, bien sûr j’y arriverai…
Je me suis coupée des réseaux et de l’information et ne me projette pas plus loin que cette échéance là… j’y consacre toutes mes forces… faibles mais croissantes.
La suite? C’est trop loin, trop incertain, pour même y penser.
Je pense à vous toutes confinées et vous espère en forme, ne levez jamais la garde, protégez vous, protégez les autres proches ou lointains, sans relâche, le temps qu’il faudra.
Je vous livre également ci-dessous quelques mots écrits à mon entrée à l’hôpital, alors que je regardais encore un peu les réseaux. Je ne les ai pas relus, je vous les livre bruts, inachevés, peut être les reprendrai-je un jour… sur ce sentiment étrange que d’appartenir à cette masse désincarnée que sont les malades atteints du Covid, je m’aperçois que si peu de mon cercle connait personnellement un malade, sévère.

JE SUIS COVID 19 POSITIF HOSPITALISÉE À FORT DE FRANCE – 23 mars 2020.

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CHU Martinique de Fort de France

« Depuis hier, je fais partie des malades, cette horde silencieuse, celles des anonymes dont on ne parle pas, parce que pas politiques inconséquents, pas soignants engagés et compétents, pas confinement rigolard et gai, lequel à la campagne, l’autre dans son salon, pas papier toilettes qui avance en rangs grossissant et serré… Pur statistique, pur comptage désincarné terrassé par le Covid.
La horde avance, masquée quand elle voudrait pouvoir respirer, pétrie de culpabilité là où elle n’est que pure victime, observée parfois par les valides ou ignorée, ramenée à une comptabilité, et à un ordre mondial… »
Ps: je sais qu’il n’y a aucun risque, mais sachez toutefois que la seule personne que je tiens à préserver de l’information de ma maladie est mon père qui vit à Paris et gère à 89 ans, son confinement courageusement, très assisté de mon frère et ma sœur à distance. Il me croit en croisière en mer.
Je vous embrasse toutes ».

LA BRINDILLE COVID 19 ENGRAISSÉE: LE RETOUR – 22 avril 2020
A vous toutes, qui m’avez écrit, qui m’avez soutenue, qui m’avez fait rire, qui m’avez émue.
Depuis mon dernier message, j’ai pu quitter l’hôpital enfin le 10 avril. Mon corps, avec une spectaculaire lenteur, tout en me jouant parfois des tours qui auraient pu mal tourner, a fini par se sevrer de l’apport d’oxygène qui m’aidait à respirer, sans qu’il soit besoin de recourir à un traitement corticoïde supplémentaire avec adjonction d’un antiviral, qui par son côté expérimental sur le Covid, ne me rassurait pas.

Son objectif était d’accélérer la cicatrisation des poumons, doublement atteints, par le virus lui même et par une pneumonie sur-infectée, et donc leur capacité à oxygéner le sang, avec le risque présumé que la cortisone enflamme le virus à nouveau . Cette difficulté s’est présentée après la fin du traitement antibiotique soignant la rechute et décompensation arrivée à J+11 de façon inattendue, alors que je devais quitter l’hôpital.
Il n’y avait à l’époque, selon les pneumologues qu’un cas similaire au mien en Ile de France. A l’époque, peut paraître une expression inappropriée s’agissant de quelques semaines, mais la maladie évolue sans cesse, et très vite. Mon cas était atypique, il ne l’est sans doute plus aujourd’hui. Tous ces détails techniques médicaux qui peuvent sembler rébarbatifs, lorsque l’on est hors de la maladie, ont été essentiels pour moi dans cette lutte (et je vous passe le vocabulaire médical avec lequel je me suis familiarisée).

Tout m’était expliqué par les médecins, les certitudes comme les doutes, les résultats de chaque scanner, chaque analyse, toutes les décisions étaient concertées dès lors qu’il y avait un doute, voire un risque, c’était nécessaire pour que mon corps suive. Le sevrage a été anormalement long, assorti d’une renutrition, et d’une rééducation des poumons, qui m’ont permis d’enfin avoir le dessus sur ce foutu taux d’oxygénation vérifié 3 à 4 fois par jour… et sortir!

En parallèle j’avais retrouvé le goût et partiellement l’odorat, deux sens dont vous prive le virus, générant un malaise étrange avec son propre corps, comme une amputation… Ma convalescence dans une petite maison face à l’océan s’achève, après de nouveaux tests récents le médecin m’a confirmé que mes poumons étaient en mesure de supporter le vol retour. Alors je rentre jeudi 23 avril, Air France a pu m’enregistrer dans un des deux vols hebdomadaires encore actifs !

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Enfin je rentre chez moi! après plus d’un mois, toute engraissée! J’ai la sensation d’avoir largement repris mon poids voire plus, après cette espèce d’étrange fringale qui m’a pris au moment de la renutrition, c’est comme si l’annonce de signe de dénutrition dans le sang avait réveillé un instinct de survie, ne rien lâcher…. elle est heureusement moins aiguë aujourd’hui! J’ai repris du poids mais sans masse musculaire, malgré mes longues promenades… donc pas mal molle 😉 et toute gorgée d’air marin et de soleil!

Je n’ai pu reprendre la lecture que la dernière semaine de mon hospitalisation, grâce à l’insistance d’une infirmière, un de ces jours où écrasée de fatigue et aux prises avec des diagnostics incertains, le découragement m’envahissait.

Ce fut une échappée et un bonheur fulgurants… vraiment… indépendamment de la qualité du livre qu’elle m’avait trouvé, que j’ai avalé en moins de temps qu’il faut pour le dire. Je lis actuellement le livre qui m’accompagnait à mon arrivée: Le lambeau de Philippe Lançon, curieuse coïncidence qui me projette dans un hôpital, une chambre d’hôpital, une lutte pour une guérison, même si ce qui nous amène dans ce microcosme hospitalier n’est pas de même nature ni comparable, sans parler de la durée d’hospitalisation, mais néanmoins… il y décrit tant de réactions et d’attitudes dans lesquelles je me retrouve; le rapport aux soignants, le refus de suivre l’actualité du monde extérieur, parce que l’hystérie et la confusion ne sont pas de mise et qu’il s’agit de ne dédier son énergie qu’à la guérison, la notion de « bienveillante cécité » de ceux qui vous aiment et vous soutiennent… mais qui eux, sont à l’extérieur. Je n’ai cependant pas pu être entourée, visitée, comme le fut Philippe Lançon, l’isolement était strict, il ne nous était pas même autorisé d’ouvrir la porte de la chambre, unité COVID oblige. Jamais je n’aurais vu le visage de mon médecin, ni d’aucun soignant, juste leurs yeux, pas plus qu’il n’auront vu mon visage, juste mes yeux… jamais je n’aurais entendu leur voix sans le filtre du masque, jamais ils n’auront entendu la mienne, de faible et haletante à plus claire, sans le filtre du masque. Une aide soignante, une seule, celle qui m’apportait en catimini le café de 6h du matin qui allait m’aider à surmonter mes migraines, qui savait qu’elle ne me reverrait plus lors de sa prochaine garde, a entrebâillé la porte, retiré son masque et déclaré dans un sourire immense « je veux que vous me reconnaissiez dans la rue », j’ai soulevé le mien et lui ai souri à mon tour. Le souvenir de cet anonymat forcé et cette conscience d’être un risque, m’accompagneront sans doute quelques temps… Je me perds, mais le COVID dévaste… sans doute comme d’autres maladies que j’ai la chance de ne pas avoir vécues.

Le post COVID me réserve probablement des surprises, des hauts et des bas, il le fait déjà… Même si je ne me projette pas au-delà de mon retour, je me dis que puisque tout doit changer, et que plus rien ne tient, changeons tout, changeons bien…
Désolée de tant de confidences, sans doute encore un effet post COVID, je ne porte plus de masque!
Merci pour toutes vos réponses à mon premier récit, chaleureuses, touchantes, tendres qui m’ont sans doute amenée à m’ouvrir un peu plus à travers celui-ci.
Je vous embrasse
Continuez de vous protéger sans relâche.

Anne Lévy

 

A propos de l’expérience de Paul Molga.

Coronavirus : un journaliste raconte son traitement à l’hydroxychloroquine

Paul Molga, journaliste pour Les Echos à Marseille, a été testé positif à la Covid-19 il y a 10 jours. Souffrant de violents symptômes, il a décidé de suivre le traitement controversé préconisé par le Professeur Raoult. Il raconte la maladie et les effets du traitement, presque immédiats.

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Paul Molga avec le traitement préconisé par le Professeur Didier Raoult. – Paul Molga

C’est le 13 septembre que Paul Molga, journaliste pour Les Echos à Marseille, a ressenti les premiers symptômes de la Covid-19 : « Grosse fatigue, mal de tête, violentes courbatures, frissons. C’est quelque chose de nouveau dans l’organisme, ce n’est pas vraiment une grippe, c’est plus violent que ça. On se sent habité, par des êtres, des virus qui sont inconnus du corps. » Très vite, Paul se rend à l’IHU Méditerranée Infection pour faire le test. Le diagnostic tombe et après une batterie d’examens, les médecins lui proposent de suivre le traitement du Professeur Didier Raoult.

Le mercredi 16 septembre, médicaments sur la table, Paul peut commencer le traitement : azythromycine une fois par jour pendant cinq jours, hydroxychloroquine trois fois par jour associée à du zinc. Et les effets sont très rapides.

« Mercredi soir, je prends les premiers médicaments. Jeudi matin, je sens que la charge virale a déjà diminué et la plupart des symptômes se sont atténués. » – Paul Molga

Au fil des jours, Paul se sent de mieux en mieux. Dès le vendredi, il a même la sensation de ne plus ressentir de symptôme. Mais il doit tout de même poursuivre le traitement pendant 10 jours. Un traitement parfois plébiscité, parfois très critiqué, notamment dans le milieu médical. Début juin, l’essai clinique britannique Recovery concluait même que l’hydroxychloroquine ne montrait « pas d’effet bénéfique » pour les malades de la Covid-19.

Paul Molga assure qu’avant de le suivre il n’était « ni anti ni pro Raoult ». Il a voulu tester pour se soigner : « Ce qui m’étonne, c’est la violence qu’on fait subir à ce traitement et à l’hydroxychloroquine. On a quand même parlé de poison alors que c’est un médicament dont on connaît les effets depuis 70 ans, il y a plusieurs continents qui en prennent régulièrement. On n’a pas parlé de taux de mortalité associé à la prise de médicament. »

En tant que journaliste il reconnaît avoir été curieux de tester ce que certains appellent « la potion du druide ». « J’avais entendu, comme beaucoup, des témoignages de malades qui guérissaient du protocole Raoult. »

« C’est ma vérité, ce n’est pas une vérité absolue. Moi j’ai pu le tester, je vois les effets et je vois aussi les gens qui n’ont pas pris de traitement et dont les symptômes traînent des semaines, voire des mois. »

Ce mardi 22 septembre, donc un peu plus d’une semaine après les premiers symptômes, Paul Molga se sent mieux, il ose même prononcer le mot « guérison » : « Je n’ai plus aucun symptôme. » 

 

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